Dire « oui », c’est consentir, c’est être d’accord.
Dans tous les cas, on n’est pas d’accord tout seul. Il faut au moins être deux, celui qui consent, celui à qui on consent quelque chose.
C’est aussi partager la vision de la situation, ce qui suppose d’avoir été informé et d’avoir compris cette information (être éclairé) mais encore être en capacité d’exprimer son ressenti et sa volonté de participer.
Il y a tant de consentements : consentement social, politique, médical, religieux, amoureux, sexuel…
Qui se tait consent-il ?
Le fait de ne rien objecter, peut-il être interprété comme un consentement tacite ?
Ne rien répondre, est-ce approuver ?
Cette zone grise de « silence » interroge.
Qui tacet consentire videtur (Qui se tait semble consentant)1,
L’absence d’un « non » exprimé ne veut pas dire « oui ». On peut se taire parce qu’on est sous emprise, par endoctrinement, par ignorance, par lâcheté, par peur…
Le moyen de « dire » quand on est afghane ou iranienne en 2023 ?
Le moyen pour nos aïeules de ne pas consentir au rôle qui leur était dévolu depuis des millénaires ? Elles l’ont accepté mais avaient-elles consenti ? Subtilité du consentement…
En médecine
S’il est un domaine où le consentement devrait être requis c’est bien en médecine.
Certains actes médicaux ou chirurgicaux sont précédés d’un consentement signé par le patient (sur papier ou par voie numérique, ce qu’on appelle le e-consentement). S’agit-il toujours pour ce patient d’un consentement éclairé ?
Quid des hospitalisations en hôpital psychiatrique à propos des soins sans consentement?
Notre société prévoit le consentement tacite, post-mortem de chacun, au don d’organes. A moins de notifier préalablement son « non-consentement ».
En cas de PMA chez les femmes seules ou entre deux femmes, un consentement est requis chez le notaire.
La fin de vie, les soins palliatifs, le suicide assisté, le consentement sur les soins de fin de vie. Autant de sujets qui interpellent l’Éthique et les réflexions du Comité National d’Éthique.
A défaut de consentement compris, partagé, en médecine, on est confronté à des incompréhensions. Pour preuve, les diverses affaires qui ont défrayé la chronique : violences lors de consultations, violences gynécologiques, obstétricales… De là à imaginer une charte que le patient devrait signer à chaque étape de la consultation (« consentement revisité ») ?
Entre consentement et viol.
Aux USA, après plusieurs affaires de viol dans les campus, des règles ont été établies. Depuis 2010, l’affirmative consent devient la norme, qui stipule que la personne doit réitérer son accord verbal à chaque étape de la relation sexuelle. Excès ? Protection indispensable ? Ou risque que la loi présente le sexe comme une chose inquiétante ?2
Ira-t-on jusqu’à considérer comme les ligues féministes américaines que le Prince charmant a abusé de Blanche neige ? Celle-ci endormie n’ayant pas donné son consentement pour être embrassée !
Chez nous, des abus, que ce soit dans le sport, dans la sphère professionnelle, médiatique ou privée, relatées souvent dans les médias, rappellent régulièrement combien ce flou entre consentement et refus non exprimé profite aux prédateurs.
Sentimental
La rupture amoureuse est souvent dénuée de consentement. L’un quitte et l’autre n’est pas toujours dans le même état d’esprit… Mais s’il y a douleur, il y a parfois aussi volonté de tourner la page sans heurt, d’où l’invention du divorce par consentement mutuel.
Qui ne dit mot consent… en politique
Une démocratie s’appuie sur le consentement de la majorité. Tant pis pour ceux qui ne sont pas d’accord ?
Qu’est-ce que donner son consentement à une décision politique ? Est-ce voter ? Et, si on n’est pas d’accord ?
Socialement
Consentir à se laisser influencer par les « influenceurs » (Tiktok, Instagram…)
La désinformation, le complotisme, les dérives sectaires…
Consentir à ne pas se laisser influencer (lanceurs d’alerte…)
Consentir et désobéissance
Pour un militaire, comment évaluer si l’ordre est juste ? Ou, à défaut, s’il convient de désobéir ? Déserter a-t-il un lien avec le non consentement ?
Dire oui à un appel religieux. Parfois totalement soudain, quitte à changer de vie du tout au tout.
On dit oui lorsqu’on s’engage.
Dire oui à un projet, à une idée, c’est faire preuve d’un consentement souverain, libre et éclairé.
Mais n’est-ce pas aussi, là, toute sa difficulté ?
1. Le pape Boniface VIII (1235-1303)
2 Ivan Jablonka « Des hommes justes », éd Seuil, 2019