Colloque 2018

Le 01/12 et 02/12
Université Paris Cité
Campus St Germain des Prés
45, rue des Saints-Pères
75006 PARIS
Thème du Colloque

Intimités en Danger ?

Colloque 2018
Gypsy XVIII (2018)

Argument

On frôle la nausée. Devant cette vague déferlante, cette curée, ce grand déballage. Blogs, Tweets, Instagram…: nouvel impératif de notre humeur contemporaine, l’intimité désormais se déverse, l’ego se répand. Le nôtre, le leur. Tout se mélange. La déchirure d’un couple célèbre, l’opprobre d’un prédateur, le quotidien d’une starlette de télé réalité, le dérapage d’un politique, la polémique autour d’un héritage familial… Vital, lorsqu’il s’agit de rompre le silence de victimes (#metoo), déroutant quand il inonde bruyamment la sphère de l’intériorité, du secret, du privé.

Hors l’amoureux, l’ami(e) de cœur, l’intimité ne se livrait jusqu’alors qu’aux professionnels. Psychologues et psychanalystes savent combien nos motivations, nos actions ont leur source dans l’intimité de l’inconscient. Médecins, chirurgiens, généticiens, obstétriciens, chercheurs…, connaissent, et se doivent de respecter, les secrets de leurs patients. Un point déontologique essentiel à l’heure où l’ovulation, la procréation peuvent être provoquées, où se pose la question de l’anonymat des dons de sperme, d’ovocytes…. Du mystère de la naissance au grand âge, jamais la juste distance entre les professionnels et leurs patients n’a eu tant d’importance.

Des siècles de littérature, de théâtre, des décennies de cinéma ont exploité l’intime, souvent avec bonheur. Entrelacs de sentiments, poussant le lecteur, le spectateur au partage, à l’empathie ou au rejet. De même l’histoire, la grande Histoire, serait-elle complète sans les révélations d’alcôve, les arcanes domestiques, les méandres affectifs ?

Reste que rarement comme aujourd’hui, livres, films, réseaux sociaux, n’auront été si loin dans le dévoilement. Sans consentement des intéressés. Biographies cabossées, secrets de famille livrés à la terre entière, quitte à blesser les proches qui ne demandaient rien. A quels motifs répondent ces récits de soi exprimés sans retenue ? De quelle légitimité se parent-ils ? Ces confessions apportent-elles une résilience ? L’auteur se sent-il ainsi réparé ?

La vie politique n’est pas épargnée. Confidences téléguidées pour séduire. Divulguées pour salir. Et que dire du respect du Droit, quand les secrets d’une instruction, d’un testament, sont livrés en pâture ?

Enfin, comment se défendre face au numérique, aux révélations non consenties ? Aux données personnelles pillées, aux violations de la vie privée ? Aux logiciels « mouchards » dans les smartphones ? Aux employeurs qui utilisent des informations à caractère privé sur l’ordinateur professionnel de leurs employés ?

Personne n’échappe à cette tyrannie de la transparence qui fait de chacun de nous un épié et un voyeur. Dans une société qui nous enjoint à transgresser les frontières de la pudeur, avons-nous encore les moyens de sauver l’intimité ?

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